Rédactrice : Priscillia Goulesco

Cytomégalovirus et grossesse : pourquoi faut-il faire attention ?

En 2015, un papa venant de perdre son nouveau-né mort dans ses bras, postait sur les réseaux sociaux un message de désespoir. Le CMV l’avait emporté, sans que personne ne connaisse vraiment cette maladie. Grâce à cette histoire et à celles d’autres parents, on commence petit à petit à en entendre parler.

Le cytomégalovirus est une infection assez courante dans le monde entier et plus de la moitié de la population occidentale est contaminée un jour ou l’autre. De la même famille que les herpès-virus, il passe souvent inaperçu alors qu’il est potentiellement dangereux pendant la grossesse. Une femme enceinte peut transmettre le virus au fœtus par le placenta et les conséquences peuvent être dramatiques. Heureusement, seulement 1,5 à 2 % des nouveaux-nés sont contaminés et tous n’auront pas forcément des séquelles.

À l’inverse de la toxoplasmose, le CMV pendant la grossesse n’est pas pris au sérieux par les autorités et beaucoup de parents en n’ont jamais entendu parler. Certains médecins recommandent de suivre des règles d’hygiène pour éviter toute contamination par les enfants en bas-âge.

Les traitements contre le CMV étant inexistants à l’heure actuelle, les jeunes parents doivent prendre des précautions particulières. Cytomégalovirus et grossesse : pourquoi faut-il faire attention ? Comment peut-on attraper ce virus ? Quels sont les risques pour la santé ? etc., voici toutes les réponses sur cette maladie encore peu connue.

Qu’est-ce que le cytomégalovirus ?

Le cytomégalovirus, aussi appelé CMV, est un virus appartenant à la famille des herpès-virus humains tout comme la varicelle, la mononucléose et le zona. Des cellules de grande taille apparaissent dans l’organisme et peuvent rester un long moment dans les ganglions nerveux, sans que cela ne pose problème.

Tout le monde peut attraper ce virus, dans n’importe quel pays du monde mais on constate toutefois que les pays en voie de développement sont les plus touchés. Dans les pays occidentaux, plus de la moitié de la population est contaminée au cours d’une vie et le virus passe inaperçu la plupart du temps. Une légère fièvre, des courbatures, de la fatigue ou un nez qui coule sont des petites maladies courantes et on ne pense pas forcément qu’il peut s’agit du cytomégalovirus.

En revanche, les personnes les plus fragiles sont à surveiller comme ceux porteurs du VIH, ceux ayant subi une transplantation ou ceux ayant un traitement médicamenteux lourd. Les femmes enceintes sont aussi très vulnérables et doivent prendre des précautions particulières pour éviter la transmission au fœtus.

Pourquoi on n’entend pas souvent parler du CMV ?

Le CMV est encore trop peu connu en France et beaucoup de femmes enceintes n’ont jamais entendu parler de ce virus. Elles font particulièrement attention à leur hygiène de vie, à ce qu’elles peuvent manger et boire, à leur activité physique ou encore à prendre soin de leur corps. On parle énormément de la toxoplasmose et des risques encourus mais peu de gens évoquent le cytomégalovirus, pourtant relativement courant.

En effet, près de 1% des nouveaux-nés sont atteints chaque année en pensant toutefois que beaucoup n’auront pas de séquelle. Les complications plus importantes tournent autour de 0,5 %. Malgré l’existence de risques, les pouvoirs publics ne semblent pas prendre l’affaire au sérieux. Pourquoi ? Selon Elisabeth Paganelli, la secrétaire générale du Syngof (syndicat général des gynécologues et obstétriciens), les mesures de prévention conseillées pour éviter d’attraper le CMV pendant une grossesse sont inapplicables par les mamans. Elle ajoute au sujet de la prévention :

“Cette recommandation n’est pas officielle. Ce n’est pas inscrit sur les fiches de santé. On ne nous dit pas officiellement ce qu’on doit dire aux femmes”.

Il a fallu attendre les témoignages poignants de certains parents pour que le mot cytomégalovirus se fasse connaître peu à peu, comme ce fut le cas avec le petit Aubin. En 2015, un papa a ému la France entière avec son message posté sur Facebook. Cinq ans plus tôt, le petit garçon de 5 semaines décédait dans les bras de ses parents, atteint du CMV. Il demande aux autorités publiques de parler davantage de cette maladie trop peu connue.

“Ce qui est bien avec le dépistage, c’est son double effet Kiss cool : il permet d’INFORMER les femmes sur le CMV et réduit donc les risques d’infection (parce que, la bonne nouvelle, c’est que LE CMV PEUT ÊTRE PRÉVENU par des mesures d’hygiène simples”.

En France, l’État ne préconise pas le dépistage du CMV au début de la grossesse car d’après certains professionnels de santé, cela ne ferait qu’engendrer des conséquences néfastes. Le nombre d’interruptions volontaires de grossesse (IVG) risque fortement d’augmenter par peur d’avoir un enfant atteint de la maladie alors que celui-ci peut très bien n’avoir aucune séquelle. On estime à 80 % le nombre de bébés qui n’auront aucune séquelle alors qu’ils étaient atteints du CMV dans le ventre de leur mère.

C’est aussi une source d’angoisse importante et souvent inutile pour les parents, d’après Suzanne Breig, gynécologue au centre hospitalier d’Annecy :

“Il ne faut pas faire psychoter les femmes”.

Autre point : il n’existe pour l’instant aucun traitement efficace contre le CMV. Toutes ces raisons expliquent sans doute pourquoi la majeure partie de la population n’a jamais entendu parlé de cette maladie.

Comment l’attraper ?

Le CMV touche plus particulièrement les adolescents et jeunes adultes, les enfants en bas-âge, les parents et les adultes ayant des contacts réguliers avec les petits. Le virus se transmet par la salive, les larmes, le nez qui coule, les urines, le lait maternel, le sang et les sécrétions génitales. C’est pourquoi les crèches, le domicile des assistantes maternelles et les cabinets de pédiatrie sont des endroits à risque pour ce type de virus. Les enfants de moins de 3 ans mettent tout à la bouche les uns après les autres et sont en train de faire leur immunité. La contamination est donc à son maximum et le personnel doit être vigilant.

Pour les jeunes parents qui attendent leur premier enfant, il y a moins de risques car ils n’ont en général pas été en contact rapproché avec un bébé. Là où il faut être davantage prudent, c’est lors de la deuxième grossesse puisque la maman et le papa s’occupent de l’aîné et le virus adore cet environnement. Si une personne a déjà attrapé le cytomégalovirus, elle sera immunisée et aura peu de chances que cela récidive.

Les mesures d’hygiène prises au cours de ces dernières années n’ont pas jouer un rôle favorable en ce qui concerne le taux de contamination des femmes pendant leur grossesse. En effet, il y a quelques décennies, la population était moins pointilleuse sur la propreté et attrapait plus facilement le CMV dès l’enfance. Lorsqu’une femme était en âge de procréer, elle était donc immunisée et les risques étaient moins élevés pour le futur bébé.

Néanmoins, les femmes enceintes mais également les hommes doivent prendre des précautions, surtout à partir du deuxième enfant. Le virus se transmet aussi lors des rapports sexuels. Il est donc recommandé de se protéger pendant la grossesse.

Voici les règles d’hygiène à respecter pour éviter toute contamination :

  • se laver les mains régulièrement et après chaque change ;
  • ne pas partager son repas, son verre et ses couverts avec son enfant ;
  • éviter le contact en cas de rhume ou de toux ;
  • ne pas faire de bisou sur la bouche ;
  • ne pas prendre le  bain avec son enfant ;
  • ne pas mélanger les gants et serviettes de toilette.

Quels sont les risques du CMV pendant la grossesse ?

Une femme non immunisée qui attrape le CMV pendant sa grossesse pour la 1ère fois (primo-infection) met en danger son bébé. Le virus peut alors passer par le placenta et contaminer le fœtus. On parle d’une femme sur 100 qui attrape le CMV pendant sa grossesse. 15 % d’entre elles le transmettent à leur bébé au 1er trimestre pour atteindre 60 % après.

Heureusement, la grande majorité des nourrissons ne présentent aucune séquelle mais le risque est quand même bien réel. Si le fœtus est contaminé lors des 3 premiers mois, les conséquences seront plus importantes. Les séquelles peuvent être graves et aller jusqu’au décès de l’enfant. Cette maladie peut engendrer :

  • des troubles de l’audition, voire surdité ;
  • des troubles de la vue jusqu’à la cécité ;
  • un retard mental ;
  • un handicap moteur ;
  • des malformations ;
  • un retard de croissance ;
  • la mort in-utéro ou peu de temps après la naissance.

À savoir : un enfant atteint du CMV peut ne présenter aucun trouble à la naissance mais avoir des séquelles neurosensorielles jusqu’à l’âge de 2 ans.

Quels sont les symptômes à surveiller ?

En règle générale, une personne en bonne santé qui attrape le cytomégalovirus ne le sait pas. Il peut n’y avoir aucun symptôme ou juste un peu de fatigue, une légère fièvre ou quelques courbatures. Bien souvent, on associe cela à un état grippal ou à une petite maladie passagère. Pour une femme enceinte, il faut être vigilant et consulter le médecin dans le moindre doute. Les éventuels symptômes apparaissent en principe un mois après la contamination.

Si, malgré tout, certains médecins prescrivent une prise de sang dès le début de la grossesse pour vérifier si la maman est immunisée, le dépistage du CMV n’est pas préconisé par les pouvoirs publics. C’est à l’échographie que des mesures peuvent être prises si les médecins estiment qu’il y a un risque. Lorsque les gynécologues aperçoivent une microcéphalie (crâne plus petit que la normale), un retard de croissance ou une hyperéchogénicité des intestins (intestin trop visible à l’échographie), des analyses plus pointues peuvent être effectuées comme :

  • une prise de sang qui permet de vérifier la présence d’anticorps chez la mère ;
  • une amniocentèse (prélèvement du liquide amniotique) pour s’assurer que le fœtus n’est pas contaminé ;
  • une IRM du cerveau du nouveau-né ;
  • des examens auditifs et des yeux du bébé.

Si la présence du virus chez le fœtus est confirmée par les examens complémentaires, la maman fera l’objet d’une surveillance particulière jusqu’à son accouchement. En fonction du diagnostic des médecins, plusieurs recours sont possibles, dont l’IMG (interruption médicale de grossesse).

Existe t-il un traitement pour ce type de virus ?

À l’heure actuelle, il n’existe malheureusement aucun traitement ni vaccin contre le cytomégalovirus. La prévention reste encore la meilleure façon de se protéger de cette maladie, en respectant les mesures d’hygiène recommandées.

Pour une femme contaminée par le virus pendant sa grossesse, les médecins peuvent tout de même administrer un médicament antiviral, le Valaciclovir, qui permet de limiter les conséquences désastreuses sur le fœtus. C’est déjà un bonne avancée dans la recherche puisque dans 80 % des cas, les bébés naissent en bonne santé. Ce traitement fonctionne 8 fois sur 10 et est valable pour les formes peu sévères du CMV.

Si l’infection du fœtus est trop importante, la maman peut avoir recours à une interruption médicale de grossesse (IMG) à n’importe quel stade de la grossesse.

Les nouveaux-nés atteints du CMV sont davantage surveillés et sont pris en charge par l’équipe médicale. Ceux ne présentant aucun symptôme font également l’objet d’un contrôle régulier pour s’assurer de leur bon développement.

En bref

  • Le cytomégalovirus est une infection assez fréquente chez l’être humain.
  • La plupart du temps, il n’y pas de symptômes significatifs. Il peut parfois y avoir une légère fièvre, de la fatigue et des courbatures.
  • Les femmes enceintes sont particulièrement vulnérables et peuvent transmettre le CMV au fœtus. Elles doivent suivre des règles d’hygiène, surtout lorsqu’elles sont en contact avec des jeunes enfants.
  • Le virus se transmet par les sécrétions corporelles et génitales : salive, larmes, urines, selles, sang, sperme.
  • La majorité des nourrissons n’ont aucune séquelle mais les risques sont quand même présents, pouvant aller du handicap au décès.
  • Il n’existe pour l’instant aucun traitement ou vaccin contre le CMV.

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